Il n’y a pas très longtemps de cela, je me suis rendue à une conférence qui traitait de la nutrition et du moyen d’obtenir un corps dépourvu de masse grasse. Cette conférence se déroulait sur 2 jours, dans un centre sportif. Nous étions une vingtaine de personnes, soit des coachs sportifs, soit des professionnels du bodybuilding. On peut dire beaucoup de choses sur le bodybuilding, mais il est un fait certain c’est que les personnes qui s’y adonnent ont une connaissance très poussée de leur corps et de la nutrition. Leur action sur leur corps, au travers de la nourriture, est une attention permanente, et la plupart d’entre eux utilisent toutes sortes de techniques pour obtenir le résultat au gramme près, sur les muscles en question.
Ceci exclu la question de savoir si le genre de physique obtenu nous plaît ou pas : ils maîtrisent, c’est un fait.
La conférence était dirigée par un jeune professeur d’une érudition remarquable.
Nous fûmes tous assez impressionnés de la capacité chez cette personne assez jeune de savoir par cœur, par exemple, quelle structure d’acides aminés était contenue dans tel aliment, ainsi que l’agencement moléculaire, voire même pourquoi, si vous combiniez avec tel ou tel atome il se passerait tel processus chimique à l’intérieur de votre corps.
Nous lui posions tous inlassablement des questions de plus en plus pointues, et inlassablement il nous fournissait des réponses qui, progressivement se paraient d’une complexité de plus en plus épaisse. Son savoir était basé sur des heures et des heures de lectures et d’échanges avec des scientifiques et chercheurs qui analysent dans les laboratoires.
Arriva la pause de midi.
Comme nous étions tous des personnes attentives à la nutrition, nous avions prévus notre repas ; chacun a sorti sa préparation. Pour ma part, c’était une salade composée, avec des ingrédients simples mais frais. Des tomates prélevées du jardin, une céréale, des olives, concombres, poivrons, herbes, et œuf de la productrice qui élève des poules, pas très loin de chez moi, dans de grands espaces, ce qui leur confère le confort animal...Bref, une salade de ce genre.
Finalement, durant les conversations à table, nous étions troublés. Même les bodybuilders qui passent le plus clair de le temps à approfondir leurs connaissances sur la nutrition : ce professeur abattait en quelques heures, des concepts nutritionnels que nous tenions pour intangibles. Par exemple, il nous incitait à utiliser des protéines issues de fruits plutôt que les sources habituelles : je m’explique...Pour obtenir ces sources protéinées qui sont en quantité infinitésimale au sein de certains fruits, la solution est de les extraire et de les prendre sous forme de compléments, en association à tel ou tel autre aliment. De même, il nous déconseillait fortement de consommer les peaux des fruits et légumes, les écorces des céréales complètes, selon des études sur les germes et grains...
Tout était infiniment complexe.
Nous regardions nos tranches de pain complet et autres morceaux de blanc de poulet en se questionnant mutuellement. Et nous nous aperçûmes que nous avions tous, plus de questions que de réponses.
À un moment, je me suis dit intérieurement : « La manière de penser actuellement, en matière de nutrition, c’est le problème, pas la solution ».
Puis, j’ai recoupé cette réflexion avec mes propres expériences de coach sportif, et je me suis souvenue que j’ai beaucoup d’élèves qui me posent inlassablement des questions angoissées, car ils ont lu tel ou tel article sur tel aliment qu’il faut absolument bannir de l’alimentation, ou sur le jeun intermittent qui résoudrait tous les problèmes de poids et de santé, sur les oligo-éléments et les protéines...quelle quantité, quoi, comment…Quelle recette miracle va leur apporter LA REPONSE.
Chaque fois, je constate que les personnes s’intéressent à des choses techniques, spécialisées, scientifiques... mais ils ne savent pas la base sur laquelle s’appuyer. Par exemple, lorsque je dis « apprenez déjà la répartition des macronutriments et la balance énergétique et vous vous en sortirez toujours », je veux parler d’une base qui devrait être la connaissance classique chez toute personne intéressée par l’alimentation. En d’autres termes : « apprenez l’alphabet avant de faire des phrases complexes !»
À la lumière de ce stage sur la nutrition que j’étais en train de faire, je me suis dit : « c’est notre manière de penser la nutrition qui créé le problème. C’est la manière actuelle de penser dans notre monde moderne. Nous rendons les choses simples compliquées et au lieu de résoudre des problèmes, nous en créons à chaque fois davantage. Ceci vaut pour la nutrition, mais la manière dis-fonctionnelle de penser aujourd’hui s’applique à bien d’autres sujets. ».
En soi, il n’y a pas de mal à vouloir approfondir un sujet, à aller dans les moindres détails de la biochimie moléculaire et tous les processus métaboliques qui font qu’un aliment va s’incorporer à vous et donner tel ou tel résultat. Mais, est ce que cette connaissance va solutionner votre relation à la nourriture ? Est-ce que cette connaissance enlèvera la frustration, la culpabilité devant la nourriture par exemple, la difficulté de choisir ce qui est bien et juste pour son corps ; est ce que ça va solutionner tous nos comportements addictifs ou compulsifs ? Rien n’est moins sûr. Car il faut apprendre l’alphabet avant de faire des phrases complexes, en d’autres termes, avant tout autre chose : créez les fondations...
à suivre...